Poetry-Gate : Sanction annulée, rectorat désavoué
Pour notre lycée Marcelin Berthelot à Pantin (93), enfin un épilogue heureux du « Poetry Gate » !
À la suite d’une formation « Laïcité » d’une qualité au mieux médiocre et qui sentait bon la traque aux
jeunes filles musulmanes, les élu·es au Conseil d’Administration ont lu, par la voix d’un des leurs, une
fable « Le serpent et le roquet » se moquant avec humour et satire de la formation.
Notre chef d’établissement, les IPR et le recteur, pris d’une panique morale assez habituelle dès qu’il
s’agit de laïcité, décident de faire feu de tout bois : entretien avec une des IPR ayant commis la
formation dans le magazine réactionnaire « Le Point », long communiqué du « Conseil des Sages de la
Laïcité » et un blâme pour le collègue ayant lu la fable.
Ce blâme vient d’être annulé par le Tribunal Administratif de Montreuil.
Mais nos maîtres doivent apprendre une chose : dans l’administration, iels ne font pas ce qu’iels veulent
et le Tribunal Administratif de Montreuil leur rappelle quelques règles :
T.A. Montreuil, 11/03/2024 : « Si les propos tenus s’inscrivent, pour certains d’entre eux, dans un
registre animalier et peuvent revêtir à l’encontre des deux inspecteurs de l’Éducation nationale (…) un
caractère désobligeant, ils ne comportent toutefois aucune injure, et ne tendent qu’à protester, sur le ton
de la caricature, contre le déroulement et le contenu d’une formation professionnelle ».
Nous avons le droit, et nous comptons en jouir sans entrave, de critiquer les formations
professionnelles, fussent-elles sur la laïcité. Le thème ne fait rien à l’affaire : quand on est nul·le, on est
nul·le.
T.A. Montreuil, 11/03/2024 : « Ces propos n’ont pas été tenus en public, mais devant les seuls membres
du Conseil d’Administration. Ainsi, eu égard à la liberté d’expression particulière qu’exigeaient cet
exercice et la défense des intérêts professionnels des personnels d’enseignement et d’éducation, à la
circonstance que les propos tenus à la fin de la séance du Conseil d’Administration (…) n’ont pas eu
d’incidence sur le fonctionnement du service public, (…) les propos tenus par le requérant n’ont pas
excédé les limites admissibles de la polémique pouvant s’exercer dans le cadre d’un mandat syndical.
Dès lors, ils ne peuvent pas être regardés comme constituant une faute susceptible de fonder une
sanction disciplinaire ».
L’expression en Conseil d’Administration est une expression syndicale, et conformément à nos
opinions syndicales, il y a fort à parier que nous utilisions cette liberté pour une critique acerbe de
l’institution scolaire.
Au delà du soulagement pour le collègue ayant été injustement sanctionné, c’est l’ensemble des
méthodes de répression du recteur Auverlot et du sinistre Blanquer qui sont encore une fois désavouées
par le Tribunal Administratif.
Espérons que cette période de répressions tous azimuts se termine. Quoi qu’il arrive, nous avons
maintenant une jurisprudence claire : au Conseil d’Administration, on défendra les intérêt des
travailleur·ses et des élèves.
C’est nous qui travaillons, c’est nous qui critiquons !
La lutte paie.
Communiqué du personnel du lycée, soutenu par le syndicat CNT éducation 93
Le poême dont il est question :
Motion – Le serpent et le roquet – Récit d’une formation Valeur de la république et Laïcité
Laissez-nous vous conter la bien étrange fable,
Dont nous devons chercher, depuis lors la morale,
D’un serpent louvoyant, la langue mielleuse,
Qui n’est pas dominant et devient bête hargneuse ;
D’un roquet aboyant, la langue fielleuse,
Sans retour connivent donc d’humeur bilieuse.
Présents parce qu’obligés un matin de novembre,
Les collègues d’un lycée venus la messe entendre,
Furent surpris pour le moins du discours entendu.
De dialogue, il n’y eut point, les questions pourfendues.
Acquiescer sans rien dire, et l’échange banni,
A leurs propos souscrire mais répondre, nenni.
Non, infantilisés, soupçonnés sans détour,
On nous a menacés, main de fer sans velours,
D’être photographiés, convoqués tour à tour,
Par un recteur caché, preuve aussi de bravoure.
Sous le masque se cachant, après les points légaux,
D’exemples iniques en faits divers démagos,
De la laïcité, des affiches de campagne,
On a vite retrouvé les sombres amalgames.
Pour étonner ainsi, leurs propos quels furent-ils ?
Un seul thème choisi, le voile des jeunes filles.
Sans surprise, quel drame, nous nous y attendions.
L’habillement des femmes sous toutes ses variations,
Du pouvoir rétrograde déchaîne les passions,
Dès que vient une estrade, ils hurlent à l’unisson.
Quelle erreur feraient-elles, si en plus d’être femmes,
A l’époque actuelle, elles étaient musulmanes.
C’est de ça, sans erreur, dont on nous a parlé,
De fréquence, de longueur, toute la matinée.
De hijab, d’oripeaux, pas de laïcité.
D’abaya, de bandeaux, pas de fraternité.
De robe et de textile, pas de l’égalité.
De photos, de chevilles, pas de liberté.
Qu’elles nous semblent éloignées, dans ces nuages si lourds,
Ces valeurs qui toutes et tous nous animent tous les jours.