Fouilles archéologiques illégales au Sahara occidental
Les chercheurs du Ouiso saisissent le CCERP de l’institut de recherche pour le développement (IRD)
Objet : saisine du Comité consultatif éthique pour la recherche en partenariat (CCERP) de l’IRD
Nous sommes un collectif de chercheuses et de chercheurs connu sous le nom d’Observatoire universitaire international du Sahara Occidental. Notre site ici.
En juillet 2020, notre observatoire découvrait l’existence de conventions de recherche signées par l’Institut de recherche pour le développement (IRD) avec le Royaume du Maroc, s’agissant de recherches menées dans le territoire du Sahara occidental où la guerre a repris en novembre 2020.
La première convention de recherche, signée par le laboratoire IRD PALOC en mai 2018, concerne des fouilles archéologiques dans la région de Smara. La seconde convention a été signée en février 2020 par l’UMR 226 ISE-M, basée à Montpellier, et la Faculté des sciences de l’Université de Rabat et concerne des recherches sur une zone humide située dans la région de Dakhla. Ces deux sites se trouvent dans la partie du Sahara Occidental sous occupation marocaine.
Nous avions alors signalé l’existence de ces conventions sur notre site et auprès des laboratoires concernés PALOC et ISE-M (ici).
Le Sahara occidental étant reconnu internationalement comme un territoire non-autonome au sens du Chapitre XI de la Charte des Nations unies, dernier territoire en Afrique en attente d’une décolonisation, et la souveraineté du Maroc (puissance occupante) sur ce territoire n’étant pas reconnue par les instances internationales, nous avions immédiatement demandé copies des conventions auprès du représentant de l’IRD au Maroc. Sans réponse des services juridiques de l’IRD, nous avions alors, le 22 décembre 2020, adressé une lettre à la PDG de l’IRD, Valérie Verdier (ici).
Devant l’absence de réaction de la présidence de l’IRD, nous avions été contraints de saisir, le 20 mai 2021, la Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) ce qui nous avait permis d’obtenir, le 4 juin 2021, de la part de la PDG de l’IRD, les copies de ces conventions, qui prouvaient que l’action de l’IRD était en violation du droit international et en discordance avec la non-reconnaissance par la France de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
Le conseil scientifique de notre Observatoire avait alors publié, le 7 juillet 2021, un communiqué « dénon[çant] l’illégalité de ces conventions, demand[ant] à l’IRD leur annulation immédiate et l’adoption d’une éthique plus conforme aux normes du Droit international, en particulier le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, aux règles du Droit international humanitaire ainsi qu’aux dispositions de la Convention de La Haye de 1954 pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé et de son deuxième protocole de 1999, rappelant que l’IRD s’expos[ait] à des poursuites judiciaires » (à lire ici).
Notre communiqué était resté lettre morte.
Enfin, en mars 2022, la députée Elsa Faucillon et le député Jean-Paul Lecoq, informés de l’existence de ces conventions, avaient écrit directement à la Présidente de l’IRD, ainsi qu’aux ministres des Affaires étrangères et européennes et de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, pour demander des éclaircissements sur ces conventions et leur annulation (ici).
Devant le silence assourdissant de la gouvernance de l’IRD, nous souhaitons aujourd’hui que le CCERP se saisisse enfin de ce dossier, qui pose de très graves questions éthiques, et apporte des réponses aux questions que nous posons depuis plus de deux années quant aux conditions de signature de ces conventions et quant à la mise en œuvre de ces programmes de recherche dans un territoire sous colonisation, où la guerre a repris il y a deux ans, enfin quant aux dispositions prises depuis deux ans par l’IRD et ses deux laboratoires pour régulariser cette situation.
Nous vous remercions par avance de toute l’attention que votre comité voudra bien apporter à ce dossier et restons à votre disposition.
Veuillez agréer, Mesdames, Messieurs, cher.e.s collègues, nos respectueuses salutations.
Le conseil scientifique de l’Observatoire OUISO
Le programme de recherche de l’IRD est visible là.